Les bourgeons ornent les branches en hiver, attendant le printemps (ICI). Mais que se cache-t-il sous leurs écailles durcies, blindées. Qu'est-ce qui se trouve bien protégé de l'hiver, sous cette cuirasse imperméable et rigide ? Pour voir ce qu'il y a dedans, on a vu qu'il suffit de l'ouvrir...
Un petit coup de lame sacrificiel à travers un bourgeon d'érable et voilà qu'on devine de toutes petites feuilles vertes (et donc bien vivantes, même en plein hiver !), bien rangées, collées les unes contre les autres sous les écailles. A leur base, un tout petit bout de tige jaunâtre, prêt à s'allonger au printemps prochain. C'est cette tige miniature qui est la future branche de l'année, celle qui portera les feuilles déployées et agrandies, comme elle porte déjà dans le bourgeon leurs exquises esquisses.
La preuve ? Voyez l'intérieur d'un bourgeon de marronnier coupé à différentes hauteurs, par l'équateur.
On y voit, noyées dans la bourre blanche (des poils qui servent d'isolant thermique et protègent l'intérieur des grands froids), de minuscules feuilles vertes découpées en 7 lobes tout frisottés, exactement comme le seront les feuilles adultes du marronnier (le frisottis en moins).
Elles ressemblent donc déjà à ce qu'elles vont devenir en été, prêtes à la poussée de croissance du printemps.
Et en plus, elles sont disposées dans le bourgeon exactement comme elles le seront accrochées aux branches ! Elles vont en effet par paires, des plus petites au cœur (étoiles bleues) aux plus grandes vers la périphérie (taille intermédiaire, étoiles rouges, et grande taille, étoiles violettes, celles-là étant d'ailleurs si grandes que la lame n'a coupé que leur pied, les pétioles). Cette disposition dans le bourgeon se retrouvera plus tard, après l'ouverture du bourgeon, sur la branche de marronnier où effectivement les feuilles vont toujours par deux et chaque paire tourne de 90° par rapport à la précédente. On appelle cela la phyllotaxie opposée décussée (phyllotaxie = disposition des feuilles le long des branches, opposée = 2 feuilles par nœud, le point d'insertion des feuilles sur la branche / décussée = croisée).
Ordonnées ainsi des plus petites au centre vers les plus grandes à la périphérie, le bourgeon se prend pour une salade... Et oui, les petites feuilles craquantes et jaunes du cœur de la laitue sont l’équivalent des petites feuilles minuscules du cœur du bourgeon ! Le chef d'orchestre qui fabrique les feuilles successives en été, dans le bourgeon comme dans votre salade, est situé au cœur de ses propres productions. Pour le bourgeon, il est au sommet de la tige miniature (la future branche) et pour la salade, au creux des minuscules feuilles jaunes du cœur. On l'appelle le méristème. Un petit tas de cellules-souches, éternellement jeunes, qui se divisent activement pour fabriquer les feuilles et les futures branches. Mais pour l'instant, en hiver, il dort, protégé au chaud sous les écailles et la bourre du bourgeon...
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