Le hêtre (Fagus sylvatica, famille des Fagacées) en hiver est au repos, comme tous les feuillus sous nos climats tempérés. Mais sur certains individus, ses feuilles mortes ne sont toutefois pas tombées au sol : elles sont dites marcescentes (du latin marcescere = se flétrir, se faner). La marcescence, c'est le fait que les feuilles mortes restent attachées aux branches au lieu de tomber à l'automne. Elles subissent bien le même sort que les autres, en se vidant de leur contenu (les arbres décidus perdent leurs feuilles en un temps très court, à l'automne : c'est l'abscission des feuilles, voir ICI "La saison du recyclage") mais dans le cas des feuilles marcescentes, elles restent obstinément accrochées aux branches. Pendant tout l'hiver. Elles ne tomberont qu'à l'ouverture des bourgeons au printemps suivant. Ce qui permet en hiver d'admirer des hêtraies toujours élégamment colorées...
La marcescence est une "marque de jeunesse" car elle concerne plus les jeunes arbres que les vieux sujets qui, eux, sont pleinement caducs (ils perdent toutes leurs feuilles à l'automne). Et quand il y a des feuilles marcescentes encore accrochées sur les troncs des grands arbres, c'est qu'elles sont sur les "gourmands" émergeant de ces troncs, des branches toutes jeunes !
La marcescence est fréquente dans la famille des Fagacées. Fagacées, vous dites ? C'est la famille du Fagus, le hêtre, qui rassemble trois cousins bien connus de nos campagnes et forêts françaises : les hêtres, les chênes et les châtaigniers. Et il est fréquent de rencontrer au détour d'un chemin de jeunes chênes hivernaux (photo), en pleine force de l'âge, encore parés de leur feuillage roussi alors que les autres feuillus autour sont dénudés.
Mais pourquoi ces feuilles mortes, rousses, vidées de leur contenu et desséchées, ne tombent-elles pas comme tout le monde à l'automne et au premier coup de vent ? Avant de s'interroger sur le "pourquoi" ("à quoi ça peut bien servir ? quelle utilité pour l'arbre ?"), il faut se questionner sur le "comment"... Les feuilles à l'automne tombent parce que la base de leur "petite queue" (le pétiole) qui les rattache à la branche se fragilise et le moindre coup de vent fait alors tomber la feuille vidée de son contenu (voir toujours ICI pour plus de détails). Pour les feuilles marcescentes, il n'y a pas de fragilisation de la base du pétiole car la zone d'abscission ne se forme pas correctement... En gros, c'est parce que le chêne ne fait pas le boulot correctement que ses feuilles ne tombent pas !
Et finalement alors, à quoi peut bien servir à l'arbre cette marcescence ? Oui, le fameux "pourquoi" ? On ne le sait pas vraiment... mais on suppute quand même quelques hypothèses... L'une d'elles est que ces feuilles persistant pendant quelques mois freineraient la circulation du vent autour des branches et les protégeraient donc du froid et surtout de la déshydratation accélérée par le vent qui dessèche... Une autre hypothèse est que la chute retardée des feuilles permet de former la litière au pied des arbres plus progressivement et donc de limiter son épaisseur. De quoi freiner au printemps la concurrence des germinations au pied de ces arbres marcescents, un moyen comme un autre de contrôler la jeunesse trop vigoureuse et concurrentielle !
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